Y2 15 l'Abbaye de Morienval
15 - L'ABBAYE DE MORIENVAL
Dans les années 840/860, les Normands remontent
D'après Les chapiteaux de l'église de Morienval, étude réalisée par l'Association dénommée : "La croisée d'ogive", on peut relever les renseignements suivants : - 1ère campagne vers 1050 : 6 Chapiteaux (style roman); - 2ème campagne vers 1060 : 11 Chapiteaux(style roman); - 3ème campagne vers 1122 : de nombreux chapiteaux dans le chœur et dans le pseudo déambulatoire (réfection actuellement visible); - Puis, dans des études, des extraits et des échanges de courriers concernant l'Abbaye de Morienval, on trouve certains renseignements (voir les échanges de courrier entre les architectes confrères en 1903) dont voici quelques extraits : - Etat des lieux du bâtiment de 920 relevé en 1900 par M. Ventre, Architecte (Projet gallo-romain); - Plan du bâtiment, de 1122, inspiré de celui de 920 et qui aurait été repris cons-ciencieusement par M Selmersheim, Architecte en chef des Monuments Historiques, entre 1900 et 1903. Il correspondrait sensiblement au bâtiment existant actuellement (Plan n°1, en 1122, de style : opus francigenum, oeuvre française), défini ainsi par le moine R. Glaber depuis l'an 1000 jusqu’au premiers édifices gothiques).
A la lecture des différents documents énumérés ci dessus, il est souvent indiqué que les travaux de 1900 ont été faits avec soin mais sans autre précision quant à ces derniers, mais avec la certitude que l'état actuel n'est pas trop éloigné de celui de 1120, d'après la précision fournie par M. Lefèvre-Pontalis. Renseignements fournis par les archéologues de 1900 : Etat des lieux de la construction de 1122 dont il faudra tenir compte dans les raisonnements qui suivront
Amorce des 6 rangs de la voûte en berceau dont la réalisation a été stoppée par Saint-Bernard en 1124 et remplacée par la croisée de nervure (d'ogive), par la suite.
CONSTATS
1) La distribution du plan est basée sur une division octogonale, ce qui entraîne un point porteur dans l'axe et surmonté d'une baie. Cette disposition n'est pas viable, les deux ouvrages sont antinomiques et cela va poser un problème lors de la réalisation des fausses nervures. Il est impératif de conserver la baie nécessaire à la détermination de l’équinoxe de printemps, laquelle marque le début de l’année religieuse et civile à cette époque. 2) Un détail important et qui n’a jamais été remarqué doit être signalé, c’est l’amorce d'une voûte en berceau, incrustée dans les murs des tours nord et sud, dont la réalisation sera brutalement interrompue puisque les cinq et les six rangs, réalisés en 1123/1124, dans les tours nord et sud, sont encore visibles aujourd’hui. Cet arrêt brutal va être suivi par la réalisation d'une voûte d'esprit gothique entre les deux tours dont la connaissance dans l'Isle de France ne peut apparaître qu’à partir des années 1123/1124, ce qui correspond à l’arrivée de Saint-Bernard lors de l’installation de Norbert de Xanten à Prémontré, en 1120, et sa présence possible dans l’Isle de France. Cette constatation permet d’affirmer que les travaux, dans le chœur de l’édifice, ont bien été réalisés en 1122. 3) On constate également la réalisation de deux nervures inutiles pour une voûte en cul de four et, en plus, si l'on se réfère aux points porteurs, ces nervures devraient être au nombre de trois. La troisième, qui devrait être axiale, correspondrait à la baie axiale qui a été réalisée puis, comblée et rouverte. Erreur qui n'a pas été faite dans l'établissement du plan du transept sud de la cathédrale de Soissons, ce qui en l'occurrence, permet d'envisager une date ultérieure et, pour tenir compte de l’évolution des connaissances, soit à partir de 1125. (Proposition qui me sert dans l'étude de la datation du transept sud de la cathédrale de Soissons). L'ensemble de ces constatations intervient dans le raisonnement pour établir une proposition de datation de l'église de Morienval, elles ne certifient pas les dates de 1122 et de 1123/1124, mais les accréditent. De même, c’est le lien entre les propositions de datation des travaux sur les divers édifices analysés qui semble leur donner une certaine valeur.
Le terrain sur lequel est construit le chœur de Morienval est de très mauvaise qualité, déjà en 920 (composé d’argile et de sources), et il faudra en tenir compte pour la conception et la réalisation du bâtiment en 1120. Ces renseignements vont être pris en compte. Le concepteur de 1120 va reprendre la forme demi circulaire et hémisphérique de 920, parfaitement adaptée, mais il va doubler le mur périphérique, en créant un pseudo déambulatoire dans l'espace dont il dispose, afin d'augmenter la surface portante des fondations, tout en n'augmentant que faiblement la surcharge. Il va cependant renforcer l'épaisseur du mur extérieur et l'équiper de contreforts beaucoup plus conséquents. Ce bâtiment, au niveau de sa conception, est à comparer à ceux conçus par les romains et les gallo-romains. L'édifice que nous avons sous les yeux comprend quatre compartiments qui créent un pseudo déambulatoire. Ces quatre compartiments présentent des nervures avec des queues, probablement incorporées à l'épaisseur de la voûte; ce ne sont pas des nervures d'esprit gothique mais elles sont très bien adaptées à leur fonction qui est de faire de cette voûte un monolithe. Ces nervures doivent être comparées aux nervures réalisées à Valsery, aux environs de 1130, (voir photo ci-après), comprenant, elles aussi, des queues liaisonnées à la voûte. Les parties du déambulatoire sont reliées au niveau des chapiteaux par des arcs rendant le tout solidaire et transmettant, par l'intermédiaire des colonnes, des forces homogènes, parfaitement adaptées à la mauvaise résistance du sol. Au dessus de ces voûtes monolithiques était réalisée une couronne, elle aussi monolithique, couverte de lauzes à l'emplacement de la couverture actuelle, en tuiles plates, et qui bloquait les faibles poussées de la voûte en cul de four. Cette voûte en cul de four, de par ses qualités, prouve l'homogénéité des travaux de la première phase (délimités en pointillés), elle exerce des poussées faibles, elle n'a pas besoin de nervures pour tenir, et les deux, à droite et à gauche de la baie axiale, sont inutiles. Par là même, elles n'ont probablement pas été réalisées par le concepteur des années
ANALYSE
L'étude des plans et de ce qu'ils recèlent comme informations est très rarement faite et pourtant, leurs avantages et leurs défauts révèlent beaucoup sur l'évolution chronologique des événements. Le plan du chœur comprenant une distribution, des points porteurs basés sur le demi octogone aux angles de 0°, 45°, 90°, 135°, 180°, permet d'envisager une étude sur la datation possible des premiers édifices dans les années 1120 et suivantes et ce, en fonction du procédé retenu par les concepteurs pour tracer les plans de leurs édifices. A Morienval, ce choix crée dans l'axe du chœur un point porteur surmonté d'une baie, en l'absence de nervure axiale, alors que les points 45° et 135° ont reçu des nervures (probablement réalisées ultérieurement car inutiles, la voûte en cul de four est auto stable). Il faut lire cette particularité ainsi : Au 11ème siècle, l'année commence à l'équinoxe de printemps, jour où le soleil se lève en plein Est, créant un rayon lumineux axial qui va traverser l'église dans toute sa longueur, au lever du soleil, et définissant le début de l'année. D'où cette baie très importante pour ce qu’elle engendre. Nous conservons, même aujourd'hui, des traces de cette période : si les mois de septembre, octobre, novembre, décembre, portent ces noms c'est qu'ils étaient le septième, le huitième, le neuvième et le dixième mois de l'année. Ceci définissait le début de l’année civile et la date du payement annuel des impôts. Eh oui, déjà! Ce ne sont plus les 7ème, 8ème, 9ème et 10ème mois, cela a changé, mais pas les impôts! La distribution du plan du transept sud de la cathédrale de Soissons, qu'il faut considérer comme un essai, fera apparaître une évolution qui, elle-même, sera très rapidement suivie par la distribution faisant intervenir le nombre d'Or; le chœur de Saint-Denis, bien que très proche, n'est pas une utilisation directe de la distribution utilisant le procédé géométrique du nombre d'Or, c’est une distribution heptagonale. En numérologie, le chiffre 7 est symbolique, de par ce qu'il signifie.
A : Pseudo déambulatoire terminé en 1122;
B : Croisée de nervures située entre les deux tours, comprenant les amorces de la voûte en berceau réalisée en 1123, puis la croisée de nervures réalisée en 1124, suivie par la voûte de la croisée de nervures en 1124, et des fausses nervures du pseudo déambulatoire, réalisées après 1124;
Tn : Tour Nord;
Ts : Tour Sud.
Précision : les nervures de la croisée de nervures (B) sont, au vu leur qualité, réalisées par un tailleur de pierre compétent, peut être un convers cistercien. Quant aux voûtes dont l’appareillage est de moins bonne qualité, elles ont pu être l’œuvre du même maçon que celles du pseudo déambulatoire. (voir photo) Sur ce point, je suis d’accord avec les archéo-logues de 1900 qui ont fait cette remarque.
Voûte de Pont-Arcy : vue supérieure d’une voûte sur croisée de nervures. A remarquer que les queues des nervures n’apparaissent pas dans les angles rentrants. Ce qui signifie que les voûtes reposent sur les nervures.
Chapelle des Templiers : c'est une coupole nervée datée de 1134 (début ou fin des travaux, non précisé). Ouvrage situé en pleine période des essais entrepris par les concep-teurs afin de découvrir les avantages et les inconvénients de cette nouvelle architecture. Il faut bien comprendre qu’une coupole exerce peu de force; ce qui explique la faible saillie des contreforts.
Les nervures, peu saillantes, laissent supposer des queues incorporées dans l’épaisseur de la voûte.